vendredi, 21 juillet 2023
Le foot se consomme à prix d’or
Le succès audiovisuel du sport, principalement en direct, stimule le marché du contenu. Gestion des droits, création de fictions, nouveaux comportements de consommation, le sport est un moteur… et pas que physique. Explications avec Pierre Maes, consultant en droits sportifs.
Comment expliquer la valeur qu’a pris la diffusion du sport ces dernières années?
Le sport est devenu le seul événement que les gens veulent voir en direct. Il est capable de fédérer au même moment des millions de spectateurs. Donc, dans tous les pays, les meilleures audiences sont celles du sport. Et même les chaînes gratuites cassent leur tirelire pour satisfaire leurs clients.
Les droits TV du sport ne cessent d’augmenter. Quel impact cela a-t-il sur le public?
D’abord, une frustration, car l’accès aux compétitions est de plus en plus restreint. Une personne qui souhaite profiter d’une offre un tant soit peu complète doit s’abonner à des chaînes payantes, et malgré cela, elle n’aura pas accès à tout. L’autre conséquence est le phénomène de l’IPTV (sites de streaming illégaux).
Pourquoi ce phénomène de piratage n’apparaît-il que maintenant pour le sport?
Le sport a vingt ans de retard sur la musique et la fiction. Ça ne fait pas si longtemps que le streaming de direct est possible, car pour regarder du live vous avez besoin d’une connexion Internet à haut débit. Voilà pourquoi le problème du piratage devient aussi aigu, maintenant que les vitesses ont augmenté.
Le streaming payant s’est présenté comme une solution valable pour endiguer le piratage de films et de musique. Pourquoi le sport ne s’y met pas «légalement»?
Imaginer un Spotify du sport qui offrirait toutes les compétitions pour un montant modique, ça n’est pas à l’ordre du jour. On se retrouve avec un déni des fédérations et des détenteurs de droits. Malgré une concurrence énorme, certains continuent à gagner des sommes colossales avec ces droits, donc ils ne ressentent ni l’envie ni le besoin de s’engager dans cette voie.
Les ayant droit ne pourraient-ils pas proposer leurs contenus directement?
Techniquement, oui. C’est ce qu’on appelle l’OTT (Over The Top), comme des Disney+ ou Netflix qui proposent leurs contenus par voie directe aux consommateurs, sans passer par un distributeur. La Liga espagnole, par exemple, a une offre OTT, et le squash a sa propre télé. Mais l’abondance de ces plateformes n’arrange personne, ni le consommateur, qui se perd, ni le producteur qui se retrouve en concurrence sévère. Et puis quand le consommateur est perdu, eh bien, il ne consomme plus. Donc, aujourd’hui encore, dès qu’un ayant droit peut nouer un accord avec un distributeur, il va le faire.
Donc la télévision continue à jouer un rôle important dans ce contexte?
En effet, on pensait que les distributeurs allaient se retrouver en situation de faiblesse face à cette offre OTT, mais on s’aperçoit que parmi ces distributeurs, ceux qui ont bien retenu leurs clients deviennent très importants. Et même des Disney+ ont intérêt à collaborer avec eux, afin de pouvoir atteindre ces clients.
Le sport a une grande puissance de storytelling, que pensez-vous des nouveaux contenus qu’il génère?
Ce sont de bons contenus, mais ça n’aura jamais la force d’attraction du direct.
Vous êtes vous-même un grand consommateur de foot, de quel service de diffusion rêvez-vous?
Le rêve serait de pouvoir regarder simultanément tous les matches européens qui se jouent le dimanche. Si quelqu’un pouvait m’offrir la solution technologique pour faire ça, je serais ravi!
En attendant la solution idéale pour ne manquer aucun instant de ses compétitions favorites, découvrez quels bouquets vous proposeront les meilleurs contenus.
Quel bouquet pour quelle compétition?
Découvrez les deux ouvrages de Pierre Maes, sur les droits du sport: «Le business des droits du foot» en 2019 et «La ruine du foot français» en 2022.
Cet article a été rédigé en partie par impact_narrative, le studio de création de contenus personnalisés d’ESH Médias. © net+. Photo © Adobe Stock Photo.